Nous venons de lire le compte rendu des débats au Sénat, compte rendu qui ne peut provoquer que la colère : face aux problèmes des nombreux travailleurs handicapés qui, depuis des années, n'arrivent pas à faire reconnaître leurs droits légitimes à la retraite anticipée, la Ministre Marisol Touraine s'inquiète surtout de les empêcher de frauder ! Et tant pis s'ils sont handicapés de naissance…

Le Gouvernement ne s'est pourtant jamais inquiété de savoir si les entreprises et les administrations gonflaient leurs quotas de travailleurs handicapés pour éviter de payer une redevance.

Quelle honte ! 

Nous ne lâcherons pas pour autant. Deuxième manche à l’Assemblée Nationale la semaine prochaine : nous relancerons les députés avec votre aide.

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Compte rendu analytique des débats au Sénat, jeudi 17 novembre 2017 : discussion à propos de l'article 30 bis du PLFSS (Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale) concernant la retraite anticipée des travailleurs handicapés :

http://www.senat.fr/cra/s20161117/s20161117_4.html#par_797 

"(...) Mme Annie David. - Les travailleurs handicapés sont usés plus vite, d'où un départ à la retraite anticipé à 55 ans. En vertu de la loi du 20 janvier 2014, la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) n'est plus prise en compte, mais le taux d'incapacité permanente exigé est ramené de 80 % à 50 %. Or cet article 30 bis rétablit le taux de 80 %.  

Il est quasiment impossible de prouver une incapacité permanente pendant toute une vie professionnelle, ce qui ôte le droit à une retraite anticipée à de nombreux travailleurs handicapés. La liste des pièces demandées lors du renouvellement des attestations est indécente : un accidenté du travail doit derechef apporter la preuve de son handicap... Elle est aussi injuste, puisqu'on refuse le dossier médical d'une personne atteinte de poliomyélite depuis son plus jeune âge.  

Au lieu de créer une énième commission, pourquoi ne pas confier l'examen de ces cas à la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) ?  

Gérard Roche, rapporteur. (...) Cet amendement [n° 308 présenté par le groupe de Mme David - NDLR] ramènerait le taux de 80 à 50 %, ce qui risquerait de faire affluer les demandes et de ralentir leur examen. En outre, les CDAPH ne sont pas les mieux à même de faire ce travail, elles n'appliquent pas toutes les mêmes règles. Enfin, l'incapacité peut s'atténuer ; la loi exige une incapacité prouvée et non réversible. Avis défavorable, par conséquent.

Mme Marisol Touraine, ministre. - Même avis. La loi de 2014 a rendu le système plus favorable aux personnes handicapées, encore faut-il faire la preuve de ses cotisations passées et de son handicap. Cet article crée une procédure dérogatoire, une sorte de rattrapage, mais dans des conditions plus strictes que dans le droit commun. Il faut se donner les moyens d'identifier les fraudes éventuelles ; on ne peut traiter de la même façon ceux qui apportent des éléments concrets et les autres.  

Mme Annie David. - Je vous parle de cas concrets ! J'ai ici le courrier d'une dame handicapée de naissance mais capable de travailler, qui n'avait aucun intérêt - au contraire - à déclarer son handicap, qui ne s'est jamais plainte, et qui se voit aujourd'hui refuser une retraite anticipée pour ce motif. C'est injuste, indécent, violent. Si nous proposons de décentraliser le traitement des demandes - quitte à créer une procédure d'appel - c'est parce qu'une seule commission n'aurait pas le temps de les traiter toutes.  

Jean Desessard. - Merci, monsieur le rapporteur, de votre franchise : « on manque de monde, ce serait trop compliqué », avez-vous répondu à Mme David. C'est donc pour des raisons administratives qu'on plonge des personnes dans la précarité ? Inaudible pour nos concitoyens ! Traitons donc les dossiers au niveau départemental, avec une instance de recours.

M. Philippe Mouiller. - Ne soyons pas trop négatifs, des efforts réels ont été faits pour renforcer les droits à retraite des personnes handicapées ; cet article, amendé par le rapporteur, simplifiera encore les choses. Reste que le problème soulevé par Mme David est réel. Aux MDPH de voir comment le régler.

L'amendement n°308 n'est pas adopté. (...)"